19h00 : je débarquais dans le QG de la compagnie pour assister au briefing de la chef de cabine pour ce vol; pour les profanes, cet entretien consiste à recevoir des informations pratiques concernant le vol (nombre de passagers, temps de vol, service donné, attributions des postes de travail,...) Ce jour-là, je recevais la poisse euh... la place fuie par tous les cabin crew: 3right. J'allais devoir checker le catering, dire bonjour une centaine de fois et me prendre le mistral autant de fois ou presque en pleine face, distribuer des gilets et des ceintures aux avortons pleurnichards, faire la démo de sécurité devant un public plus perplexe que captivé et me taper la distribution des repas. La chef nous rappelle solennellement que nous allons à Burgas Varna, au bord de la mer Noire en Bulgarie. Elle avait l'air de réprimer une violente envie de soupirer. En effet, j'avais entendu dire par des collègues que c'était un vol "pas facile" avec un public "assez spécial". J'avais voulu en savoir davantage, et on m'avait répondu ça ne s'explique pas, ça se vit...
Nous sommes partis pour l'avion. L'embarquement commençait. Je me suis mis à mon poste à côté des sorties de secours pour réceptionner le bétail. Les premiers paxs franchissaient la porte.
" Goien avond / bonsoir!
- ... (un premier vent)
- Goien avond / bonsoir!
- ...
- Goien avond / bonsoir!
- Ja.
- Goien avond / bonsoir!
- Wablieft??!
- Goien avond / bonsoir!
- Ah!
- Goien avond / bonsoir!
- ...
- Elle te dit fourte, me dit un collègue.
- Bonsoir, répond finalement la nieuse. "
En les regardant passer, j'avais l'impression que j'étais assis au bar de la taverne du coin : le couple de pochards au visage couperosé, les piliers de comptoirs à l'haleine chaude, éthylée et piquante, les Bulgarces au sourire en or rapatriées de la gare du nord, les moustachus au dentier défoncé,... Je savais déjà que la bière et le gros rouge allaient couler à flot! Je n'ai pas peur de dire qu'ils avaient dû rogner de leur budget cigarettes roulées au moins 199€ pour leur all-in piquette à volonté d'une semaine.
Les passagers enfin arnachés comme des poneys au regard expressif de merlan frit, ou expectatif comme si j'allais leur faire un spectacle de majorette, singeaient lamentablement les consignes de sécurité que je leur donnais d'un air blasé. L'avion en bout de piste attendait l'autorisation de décoller. Soudain, le passager de la dernière rangée côté couloir, en mode marcel, slash Jupiler et coiffure huileuse, a ouvert sa tablette et y a déposé son 6pack de Carapils avec fracas! "Hé! Monsieur! Fermez votre tablette, on va décoller!"
Gêné, il a rangé son stock sous son siège, mais pas sans avoir pris soin de prélever une cannette.
CLIC PSHHHHH! Malgré les réacteurs qui rugissaient dans l'impulsion du décollage, on avait entendu clairement le bruit d'une cannette qu'on ouvrait, suivi d'un GLOU GLOU avide. S'il voulait être discret, c'était plutôt raté! Je me suis tourné vers ma collègue, l'air étonné et elle m'a fait signe de la main de laisser tomber. Je lui ai quand même dit qu'il ne pouvait consommer que les boissons alcoolisées vendues à bord.
Donnez-moi quat' bières! me dit-il avec sa voix d'ivrogne .
Ce soir là, le service repas ressemblait plutôt à un service buvette de kermesse. L'heure était maintenant à la vente des produits hors taxes. Les fardes de cigarettes se vendaient comme des petits pains! Privés de houblon, les paxs se rabattaient sur le JB, le Jack, le Johnny et la Smirnof. D'autres se jetaient sur les dernières bouteilles de Ricard, pour leurs soirées romantiques sur la terrasse de l'hôtel bas de gamme. Sidji en tenue fleurie et maquillage perroquet y trinquerait avec Dylan en chemise hawaienne, la clope vissée au bec, en se disant : "Dans les yeuuuux!" Arrivé à la dernière rangée, le passager me demande 10 fardes de cigarettes. Je les lui ai données en constatant qu'il en avait déjà achetées huit au duty free de l'aéroport. Il s'était sans doute fait une provision pour ses soirées bingo.
Soudain, un autre passager a appelé. J'ai lancé à ma collègue : "Putain, ils vont pas nous lâcher, ceux-là!" Je suis allé voir ce qui se passait. Une petite gens de Wallonie de la quarantaine qui voulait sûrement se la jouer classe avec son vrai faux chemisier Gucci (moi j'avais plutôt envie de lui dire qu'elle avait des goûts de chiotte) me demandait lamentablement de dire au passager assis devant elle de redresser son fauteuil. Son petit corps gras saucissonné dans son siège n'avait plus assez de place! Elle ne parlait pas le flamand pour le lui dire elle-même. Je lui ai répondu que pendant les vols de nuit, les passagers pouvaient incliner leurs sièges et que je n'étais pas un gendarme pour gérer les disputes de cour de récrée. Puis, je l'ai plantée là avec ces informations en me disant :"Tire ton plan baraki!" Quelques minutes plus tard, alors que j'étais en plein potin dans le Galley, j'ai entendu un "A l'aiiide!" hystérique. J'ai accouru. M'attendant à un coma éthylique, je me retrouvais encore face à la même rombière mais avec un oeil au beurre noir en plus sur sa face bouffie. Je lui ai demandé ce qui s'était passé. Elle m'a répondu que le type en face d'elle lui avait mis un pain. Celui-ci m'a raconté la scène. La passagère lui donnait des coups de genou dans le siège, il les lui rendait en poussant avec son dos. Il s'est alors retourné et elle a saisi la poupée de sa fille pour le frapper au visage. Furieux, il lui a donné un coup de poing. J'ai décidé de déplacer le passager, pour calmer leurs ardeurs. Elle me disait :"Je veux porter plainte!" Je suis allé rejoindre mes collègues en leur disant que c'était juste encore des passagers qui se bouffaient la gueule à cause des sièges. Ce vol portait vraiment bien son nom : Burgas, que des bourins à bord qui ne savent pas se tenir.
Ce soir là, le service repas ressemblait plutôt à un service buvette de kermesse. L'heure était maintenant à la vente des produits hors taxes. Les fardes de cigarettes se vendaient comme des petits pains! Privés de houblon, les paxs se rabattaient sur le JB, le Jack, le Johnny et la Smirnof. D'autres se jetaient sur les dernières bouteilles de Ricard, pour leurs soirées romantiques sur la terrasse de l'hôtel bas de gamme. Sidji en tenue fleurie et maquillage perroquet y trinquerait avec Dylan en chemise hawaienne, la clope vissée au bec, en se disant : "Dans les yeuuuux!" Arrivé à la dernière rangée, le passager me demande 10 fardes de cigarettes. Je les lui ai données en constatant qu'il en avait déjà achetées huit au duty free de l'aéroport. Il s'était sans doute fait une provision pour ses soirées bingo.
Soudain, un autre passager a appelé. J'ai lancé à ma collègue : "Putain, ils vont pas nous lâcher, ceux-là!" Je suis allé voir ce qui se passait. Une petite gens de Wallonie de la quarantaine qui voulait sûrement se la jouer classe avec son vrai faux chemisier Gucci (moi j'avais plutôt envie de lui dire qu'elle avait des goûts de chiotte) me demandait lamentablement de dire au passager assis devant elle de redresser son fauteuil. Son petit corps gras saucissonné dans son siège n'avait plus assez de place! Elle ne parlait pas le flamand pour le lui dire elle-même. Je lui ai répondu que pendant les vols de nuit, les passagers pouvaient incliner leurs sièges et que je n'étais pas un gendarme pour gérer les disputes de cour de récrée. Puis, je l'ai plantée là avec ces informations en me disant :"Tire ton plan baraki!" Quelques minutes plus tard, alors que j'étais en plein potin dans le Galley, j'ai entendu un "A l'aiiide!" hystérique. J'ai accouru. M'attendant à un coma éthylique, je me retrouvais encore face à la même rombière mais avec un oeil au beurre noir en plus sur sa face bouffie. Je lui ai demandé ce qui s'était passé. Elle m'a répondu que le type en face d'elle lui avait mis un pain. Celui-ci m'a raconté la scène. La passagère lui donnait des coups de genou dans le siège, il les lui rendait en poussant avec son dos. Il s'est alors retourné et elle a saisi la poupée de sa fille pour le frapper au visage. Furieux, il lui a donné un coup de poing. J'ai décidé de déplacer le passager, pour calmer leurs ardeurs. Elle me disait :"Je veux porter plainte!" Je suis allé rejoindre mes collègues en leur disant que c'était juste encore des passagers qui se bouffaient la gueule à cause des sièges. Ce vol portait vraiment bien son nom : Burgas, que des bourins à bord qui ne savent pas se tenir.
J'ai déjà eu l'occasion d'assister à une scène de ce genre lors d un vol. D'un côté des parents dépassés par l'ardeur de leurs chérubins diaboliques ;-) et d'un autre, des petits vieux guindés qui ne supportent que leur silence (bientôt éternel d'ailleurs). Regards de travers, mots gentils et couloir qui a évité la transformation en ring de boxe grâce à la présence du personnel de cabine. Nous spectateurs écoeurés d'actes aussi stupides qu'inutiles avons subi leur violence verbale (et presque physique) durant une bonne partie du vol. Quel bel exemple pour cette jeunesse déjà tant indisciplinée!!
RépondreSupprimer